Covid et travail : Épuisement

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Depuis huit long mois que l’équipe de Regard en Elle (REE) travaille sans relâche avec un niveau de stress supérieur à l’habitude, qui soit dit en passant, est déjà considérable dans une ressource d’aide et d’hébergement pour femmes violentées avec ou sans enfants.

Toutes les travailleuses (régulières, temps plein, temps partiel, contractuelles et remplaçantes et peu importe leur fonction) investissent des énergies incommensurables pour maintenir des services de qualité et sécuritaire tant à l’hébergement à court terme, l’hébergement de deuxième étape, la ligne d’écoute, les accompagnements que pour les services en externe… Leurs efforts sont multiples, en plus de faire face à des casse-têtes complexes et infinis, elles vivent comme tout le monde de l’insécurité face à cette pandémie mondiale qui dans les faits, prend de plus en plus de galons.

L’équipe de travail s’est rapidement et formidablement mobilisée afin :

  • d’appliquer de nouvelles mesures sanitaires (désinfection, 2 mètres, port du masque bien avant l’obligation gouvernementale…) à la longue liste déjà existante pour contrer les poux, les punaises, les maladies contagieuses …
  • de s’adapter à leur environnement et outils de travail divers (pour certaines à domicile en partie ou totalité, rencontre téléphonique ou virtuelle …)

Cette pandémie est dévastatrice ! Elle est entrée dans nos vies insidieusement en nous dépouillant de notre contrôle en plus d’être violente psychologiquement, physiquement, économiquement… Du déjà vu pour les femmes violentées, un double impact pour elles et leurs enfants.

Personne n’est à l’abri et ni les organisations/entreprises qui ont la chance de rester ouvertes, mais qui sont toutefois confrontées à de multiples défis. REE n’est pas dispensée et à plusieurs niveaux, comme en termes de remplacements ( ex demande d’isolement avec enfants par l’école…) ; du jamais vu depuis les 15 dernières années.

On entend avec raison, l’épuisement des travailleurs et travailleuses du milieu de la santé… Mais l’épuisement va bien au-delà de ce secteur. Elle a touché toutes les personnes qui ont poursuivi leur travail depuis le Jour 1 de la pandémie… et en conséquence, l’épuisement touche les travailleuses de REE.

Mais comment préserver la santé tant physique que mentale des travailleuses tout en assurant des services de qualité ? Comment maintenir notre milieu de travail exempt d’éclosion dans un climat respectueux et de confiance ?

Heureusement le dévouement et le professionnel de l’équipe a porté fruit jusqu’à maintenant… mais l’énergie s’évapore … et les miracles n’existent pas…  La pandémie implique par défaut, une lourdeur supplémentaire… Qu’on se le dise, c’est plus difficile de travailler notamment en hébergement :  avec les mesures sanitaires-gouvernementales, le stress relatif à la pandémie, les contraintes directes et indirectes à la pandémie… c’est demandant de travailler en partie en télétravail… d’utiliser de nouvelles technologies sans temps pour l’appropriation … Soyons honnêtes, c’est plus exigeant, plus lourd de travailler à REE depuis la pandémie.

Et que dire des femmes et leurs enfants utilisant les services …

Depuis plus de 30 ans, REE est reconnue pour son milieu familial, chaleureux et sécuritaire avec un minimum de règles pour aider le vivre ensemble… Un lieu bienveillant favorisant les liens de confiance, l’entraide, le cheminement … Mais depuis mars dernier, c’est difficile pour les femmes hébergées et leurs enfants :

  • les personnes ne portent pas de masque dans leur maison/appartement, MAIS à REE, les femmes et enfants se couvrent le visage aussitôt qu’ils circulent ou qu’ils n’ont pas le 2 mètres
  • les personnes peuvent discuter au moment souhaité au téléphone dans la salle à manger, ou jouer dans la salle de jeux, ou écouter la télévision dans le salon MAIS à REE,  cela dépend du nombre de personnes dans les pièces communes…
  • un parent confiné avec son enfant suite à une demande de l’école est isolé dans sa maison/appartement, MAIS à REE, la mère sera confinée avec son enfant dans sa chambre
  • et à REE,  la désinfection c’est bien plus qu’une simple tâche

N’oublions pas les mesures spéciales relatives aux zones de couleur comme celles empêchant les rassemblements sociaux, familiaux, un sacrifice terrible dans un moment où le réseau peut être un soutien indéniablement essentiel… Ou encore les contraintes auxquelles les femmes utilisant les services en externe sont confrontées… Tantôt en présentiel, tantôt au téléphone, tantôt en virtuel… et tout cela, dans la mesure où les lieux, les technologies sont sécuritaires et accessibles.

La situation perdure et use tous les citoyennes et les citoyens. Les femmes, leurs enfants ainsi que les travailleuses de Regard en Elle ne sont pas épargnées, bien au contraire. Une triste et préoccupante réalité.

 

À la veille des douze jours d’action contre la violence faite aux femmes                                                   

Du 25 novembre, journée internationale contre la violence faite aux femmes, au 6 décembre, journée commémorative de la tuerie de la polytechnique

Pour les femmes violentées et leurs enfants

Pour les travailleuses des ressources d’aide et d’hébergement, de Regard en Elle

Pour que les sacrifices de toutes et tous ne soient pas vains

Plus que jamais, soyons solidaires et poursuivons notre lutte à la pandémie

Chaque effort compte ; mais seulement toutes et tous Ensemble !

Un texte de la Maison Regard en Elle

 

photo : Engin Akyurt / Pixabay